Parfois, après une longue absence, un chien peut sembler se souvenir d'une personne, ou au contraire l'oublier, malgré tout le temps passé ensemble. Selon les cas, cela peut donner lieu à des émotions négatives ou positives chez les humains !
Mais un chien peut-il réellement se souvenir des personnes qu'il a rencontrées ? Comment se construit la mémoire du chien ? Autant de questions qui soulèvent des réflexions pasionnantes...
Comment savoir si un chien se souvient des personnes qu'il a rencontrées ?
En étudiant le comportement animal, il y a des choses qui paraissent évidentes pour tout le monde, et qui sont pourtant très difficiles à démontrer. C’est le cas de l’étude de la mémoire chez les animaux.
La difficulté est toute simple : ne pouvant pas parler verbalement comme nous, les scientifiques doivent lire et interpréter les signes qu’envoie l’animal, pour en déduire ce qu’on cherche.
En étudiant la mémoire, on se retrouve confronter à cette difficulté : comment savoir que le chien réagit positivement à des retrouvailles, quand il présente le même comportement avec tous les individus qu’il rencontre ? C’est là que peuvent se générer des erreurs : on interprète souvent à tort le comportement observé comme celui qu’on veut observer…
D’où l’intérêt de s’appuyer sur des marqueurs objectifs (c’est tout le fondement de la méthode scientifique). En pratique, il y a des différences, parfois subtiles à observer, parfois évidentes, entre ces deux situations (personne connue, et inconnue). Et pour autant que la réaction soit propre à chaque chien, on peut établir des points communs entre tous les chiens et en déduire ce qui se passe dans leur tête.
Par exemple, on peut mesurer la durée de la fête que le chien nous offre à l’accueil, tout bêtement. On s’attend bien sûr à trouver des effusions de joie plus longues en présence d’une personne déjà rencontrée.
En reproduisant l’expérience sur un grand nombre de chiens, et en faisant une moyenne, on peut tirer des conclusions généralisables : le chien est effectivement capable de reconnaître des personnes qu’il a déjà rencontrées (humains ou même les autres animaux).
Chien et mémoire : une question de perception
Sur quelle base le chien fait-il le tri entre tous les êtres vivants qu’il a connu ? On peut citer l’odorat, comme critère numéro un pour identifier les individus, mais autant ça semble évident, autant c’est impossible pour nous de l'imaginer.
L’odorat occupe la moitié d'un cerveau canin, et occupe une surface considérable dans le museau : jusqu'à 200cm² pour un berger avec 200 millions de cellules olfactives (seulement 4cm² et 5 millions de cellules chez l'homme).
Essayer d’imaginer ce que « sent » le chien, c’est comme demander à une personne aveugle de décrire les couleurs ; on est totalement incapable d’imaginer ce que le chien perçoit à ce niveau.
On sait que la vue du chien, basée sur le mouvement, moins nette et moins colorée que la nôtre, ne lui permet pas une bonne acuité visuelle. Cela dépend des races (certaines ont été sélectionnées pour une chasse à vue), mais d’une manière générale, un chien ne reconnait pas forcément son maître s’il est trop loin, juste avec la vue.
Par contre, l’ouïe est souvent plus développé : on sait que le chien est capable de distinguer des sons qui nous paraissent identiques, comme le son du moteur de la voiture familiale, reconnue dès l’entrée dans le lotissement parmi toutes les autres car associé un évènement heureux (le retour de papa par exemple ?).
Le chien a une mémoire associative
Donc pour le chien, nous sommes un ensemble d’odeurs, un timbre de voix, et une image pas nette, qu’il va associer à ce qu’il ressent avec nous. Il mémorise tous ces éléments en les associant aux évènements qui se déroulent avec nous : la mémoire des chiens est dite associative, justement. Il marque d’autant plus les choses qu’il perçoit dans son cerveau, que quand elles sont synchronisées.
Par exemple, un chien ne se souviendra pas de vous si vous déposé un cadeau qu’il va consommer plus tard (même si vous lui avez montré comme venant de vous).
Par contre, il ne vous oubliera jamais si vous lui offrez directement, ou même 1h de son jeu préféré, et il y a fort à parier qu’il vous quémandera à nouveau lors à votre prochaine rencontre !
C’est finalement assez intuitif, mais la mémoire du chien, comme la nôtre, fonctionne aussi sur un fond émotionnel. Une émotion intense, qu’elle soit positive ou négative, va imprimer le souvenir dans le cerveau.
D’ailleurs, la nature a sélectionné des cerveaux très sensibles aux émotions négatives, et pour cause : se souvenir des traumatismes du passé est certes désagréable, mais reste le meilleur moyen de les éviter à l’avenir !
Donc faites attention à l’impression que vous donnez aux animaux que vous croisez : ils n’ont pas la culture d’une société humaine (ils n‘ont pas les mêmes compétences cognitives) et ils ne feront donc pas nos erreurs classiques en matière de préjugés, par contre ils ont de l’expérience, et retiennent ce qui leur arrive.
Il n’est pas rare par exemple de croiser des chiens « sexistes », dans le sens où ils ont un vécu différent entre les hommes et les femmes et ne se comportent pas de la même façon avec les deux sexes (fréquemment, on voit des chiens qui ont peur des hommes…).
Comment donner à mon chien de bons souvenirs ?
Au final, la mémoire du chien fonctionne un peu comme celle d’un enfant en bas âge.
Nos compétences cognitives évoluent rapidement au-delà de ce qu’un chien est capable de faire toute sa vie, mais avant 2-3 ans, nos réactions par rapport aux individus connus et inconnus sont très proches ! La mémoire n’est pas une compétence innée, elle se développe au cours du temps, avec l’entraînement.
Vous verrez donc votre chien avoir ses copains préférés, ses têtes, son ennemi juré, ou d’autres personnages qu’on peut imaginer sur les relations qu’il va avoir avec son entourage. Le chien est un animal social, il fait donc très attention aux autres individus qui l’entourent.
Souciez-vous de lui donner de bonnes expériences avec le plus d’individus possibles, que ce soit des humains, ou d’autres espèces : chat, oiseaux, lapin… tout ce qu’il est susceptible de devoir rencontrer dans des circonstances amicales !
Surtout avant l’âge adulte : comme un humain, le chien construit sa personnalité sur ces expériences, il faut donc veiller à ce qu’elles soient positives et constructives dès le départ.
Dr Stéphane Tardif
Docteur vétérinaire et rédacteur pour Wamiz
A lire aussi : Deux chiots russes séparés puis adoptés en France se revoient pour leur 1 an : l’émouvante vidéo de leurs retrouvailles
A voir aussi :