Petit bébé, je lis ton dossier, et j’ apprends avec horreur que cela faisait quatre jours au moins que dans le huis clos sordide de son appartement, tu subissais les assauts cruels de ton maitre… Le dos brûlé, sévèrement, et l’œil crevé, et pour parfaire son forfait, lorsque tu as agonisé, que tu n’avais plus la force de répondre à ses assauts, il t’a jeté à la poubelle comme un Kleenex usagé, et c’est là qu’on t’a trouvé, et sauvé.
Pauvre petit, comment a- t-il pu, et encore en niant les évidences, et en se rebellant contre le système ? Tout y est dans la personnalité de ton tortionnaire, un casier à rallonge, vols, menaces, outrages, séjour irrégulier, fourniture d’identité imaginaire ... Mais pourquoi toi, si frêle, tellement vulnérable ? Une seule réponse, parce qu’il est lâche, il s’attaque à tout petit et sans défense pour assouvir sa soif de cruauté, il est dangereux. Il faudra bien accepter cet état de choses, et même si le parquet a ordonné une expertise psy, celle-ci a bien conclu à la responsabilité pénale du mis en cause. La psychiatrie est appelée au secours des institutions quand elles sont sidérées par la gratuité des actes perpétrés. Et bien, il faudra admettre que S.T. est violent et pleutre, qu’il a considéré IBOO comme un jeu, un passe-temps, un objet qui ressent la douleur, qui hurle, et ça rend la violence interactive, ça doit lui donner des sensations de faire mal, très mal, d’ébouillanter le dos de IBOO, de le frapper, de le voir se débattre vainement, et de lui crever l’œil.
Pour rebondir, on aurait tendance à dire œil pour œil, mais la loi du talion n’honore pas la justice, car c’est infliger ce que nous condamnons. Alors, il reste la prison, un endroit sûr, où on espère que S.T va faire un long séjour, le plus long possible, et ce sera tout le sens de ma plaidoirie.
Pour « venger » IBOO et sa douleur, pour mettre au ban de la société pour un temps cet être qui n’a d’humain que le mot, pour calmer l’ordre public qui est choqué par cette cruauté infligée à un bébé, pour enfin dissuader d’autres tortionnaires en herbe. Tout cela sera plaidé et martelé, pour IBOO, qui va guérir de ses blessures, et trouver une bonne famille pour qu’il ait de l’humain un autre visage, doux et aimant, et plus celui de son bourreau, déformé par la soif du mal.
Maître Isabelle Terrin
Avocate