L'avis de l'éducateur canin
Beaucoup de gens choisissent encore aujourd’hui un chien sur son seul aspect physique, grave erreur qu’ils paient fort cher ensuite, par une grande désillusion mais aussi des soucis, des frais et parfois des blessures. On ne redira jamais assez l’importance de la prise en compte du caractère d’un chien dans sa sélection.
Les premiers qui doivent s’en préoccuper sont les éleveurs, et si certains mettent même en avant ce critère, d’autres par fainéantise, négligence, ignorance ou incompétence n’en tiennent pas compte. Combien d’éleveurs professionnels ou amateurs font reproduire des chiens « ingérables » mais de grande lignée, sans se soucier des caractères transmissibles, que l’on parle de peur ou de « gros tempérament », pour ne pas dire de sale caractère ?
Dans un second temps, c’est au futur propriétaire de baser son choix avant tout sur des qualités comportementales plutôt que sur des critères esthétiques. Certains sont « favorisés » puisque, dans certaines races, on trouve des lignées de « beauté » et d’autres de « travail » ; les premières privilégiant le physique (parfois au détriment d’une vraie sélection comportementale), les secondes proposant des chiens destinés aux épreuves de travail (plus de caractère et un respect du standard moins pointu).
La tendance générale est de transformer en races de compagnie des races conçues à l’origine pour remplir une fonction utilitaire, mais des décennies de sélection ne s’effacent pas si facilement en quelques années. Qui plus est, un chien reste un chien avec des caractéristiques propres à son espèce Canis lupus familiaris, un canidé avec un vrai caractère de chien !
Le Léonberg, une histoire à part
Molosse allemand particulièrement impressionnant, le Léonberg représente une exception dans le monde cynophile. En effet, c’est sans doute le seul grand chien qui n’a pas été créé pour travailler mais directement pour devenir chien de compagnie. Son excellent caractère lui permet d’ailleurs de remplir merveilleusement ce rôle.
Mais alors, pourquoi diable vous parler de ce géant au grand coeur dans un ouvrage consacré au chien de caractère ? Tout simplement parce que son standard précise que le Léonberg est un chien impavide. Ne courez pas chercher votre dictionnaire (je l’ai fait pour vous) : impavide signifie que le Léonberg est inaccessible à la peur, rien que ça ! Bien sûr, il n’en est rien, tout au plus s’agit-il d’un rêve d’éleveur, ou d’un argument commercial avant l’heure !
Heureusement, cela n’empêche pas ce chien d’être un chien de famille quasi idéal. Un chien avec du caractère est un peu plus délicat à gérer qu’une bonne pâte, c’est évident, mais cela ne signifie pas qu’il faille le battre comme plâtre sous prétexte qu’il n’est pas facile. C’est ce qu’ont fait des générations de maîtres sous prétexte que leur chien était soi-disant dominant.
La dominance aujourd’hui largement remise en question a surtout été un formidable prétexte à des abus d’autorité en tous genres. S’il faut être ferme pour gérer un chien ayant un fort caractère, ferme n’est nullement synonyme de brutal. À bon entendeur…
Certains ne sont pas capables de fermeté : peut-être ne devraient-ils pas choisir des races à fort potentiel ?
Il existe une catégorie de couple maître/chien où le chien finit mal : abandonné ou même euthanasié parce qu’il était « ingérable ». Très souvent, si on peut intervenir avant qu’il ne soit trop tard, on se rend compte que le chien était ingérable, ou « dominant » comme ils disent par la force des choses. Je m’explique : ce même chien géré par quelqu’un d’autre ou mis dans une autre famille ne pose souvent plus aucun souci.
De là à dire que ces premiers maîtres étaient en partie responsables de cet état de fait, il n’y a qu’un pas que je franchis allègrement. Comme l’a fort justement dit un grand homme de cheval : « Si vous ne faites pas partie de la solution, vous faites sans doute partie du problème » !
Avoir un chien avec du caractère que l’on ne maîtrise pas bien signifie que les promenades seront source d’angoisse ; angoisse de croiser des congénères, qu’un homme s’approche pour demander son chemin ou qu’un enfant vienne pour le caresser (des situations normalement anodines) !
Recevoir des amis ou des livreurs ou simplement le facteur devient toute une histoire ; aller chez des amis ou à l’hôtel une aventure très risquée plutôt qu’un bon moment partagé ; les visites chez le vétérinaire des parcours du combattant… Bref, les désagréments l’emportent largement sur le plaisir de posséder un chien.
Karl, un Rottweiller de caractère !
Dire d’un Rottweiller qu’il a du caractère, c’est un pléonasme. Tant il est vrai que ce sont des chiens avec un fort tempérament. Karl est le Rottweiller que j’ai adopté à la SPA, à l’âge de 2 ans. Si je lui reconnais du caractère, je ne le lui reprocherai jamais. C’est un chien qui a su parfaitement maîtriser une meute de près de quinze individus sans jamais blesser qui que ce soit. Sa gestion au quotidien a demandé une attention sans faille mais rien d’impossible.
Mon épouse l’a gardé bien des fois sans souci, de même les vétérinaires ont toujours été impressionné par ses bonnes manières lors des visites annuelles. Bref, un chien de caractère, et non caractériel ! Bien tenu en main par des maîtres responsables, il ne pose pas de problème.