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Evolution de l’animal domestique à l’animal familier

Par Éric Duchêne Rédacteur | Journaliste

mis à jour le

Un animal est dit domestique à partir du moment où il est élevé, nourri et reproduit dans un environnement humain. Il est distinct de l’espèce sauvage, ses caractéristiques sont héréditaires et résultent d’une sélection. Ce qui caractérise un animal dit familier, c’est en plus d’avoir une relation particulière avec l’humain, sur le plan affectif.

La majorité des espèces domestiquées par l’homme le sont à vocation alimentaire. Il s’agit de toutes les espèces de rentes (bovins, ovins, caprins, volailles, cochon…) et l’homme a pratiquement essayé toutes les catégories d’animaux qui existent dans son assiette. La fonction « transport » a aussi longtemps été occupé par le cheval. Mais aucune espèce avant le chien n’est venue nous accompagner uniquement pour des raisons affectives.

Ce qui est important également de noter, c’est que cette évolution vers l’animal familier est arrivée très tardivement par rapport à la domestication : bien que le chien soit proche de l’homme depuis plus de 10 000 ans, il n’occupe un espace affectif que depuis un siècle à peine.

Le chien, un outil de travail pour l’humain

Il y a plusieurs théories qui viennent expliquer ce phénomène, mais la plus probable reste l’évolution de nos conditions de vie. Auparavant, les sociétés humaines ne disposaient pas des ressources nécessaires pour partager totalement gratuitement avec le chien. Il devait remplir une fonction pour habiter près de nos foyers. Mais depuis un siècle et la mécanisation de notre société, le chien a perdu quelques-unes de ses fonctions au travail.

De plus, cette mécanisation a surtout enlevé les tâches chronophages et épuisantes de notre quotidien, et ce temps gagné a clairement pu être dépensé pour notre loisir. Le chien a juste profité de cette évolution dans nos modes de vie, pour se faire une place dans ce nouvel environnement confortable. Et armé de 10 000 ans d’évolution à notre contact, il a parfaitement su nous séduire sur le plan affectif, nous permettant d’oublier son rôle initial d’outil de travail, et lui donnant une place émotionnellement importante dans nos vies.

Le chien est une espèce sociale

Un autre critère qui explique grandement la relation homme chien, c’est la capacité du chien à être social. C’est un mot tellement utilisé dans la société moderne qu’il en a perdu son sens initial : en éthologie, le terme social désigne une espèce qui forme des groupements permanents, constitués d’individus de la même espèce, sur plusieurs générations.

Aristote écrivait déjà sur ces notions : "Certains animaux vivent en troupes, d'autres solitaires, qu'il s'agisse d'animaux qui marchent, volent ou nagent […]. Ont l'instinct social, les animaux qui agissent tous vers un but commun, ce qui n'est pas toujours le cas de ceux qui vivent en troupes. Sont ainsi les hommes, les abeilles […], les grues." Histoire des animaux. Livre I.1. p.15-16

Concrètement, cette caractéristique fait que le chien est compétent pour lire et réagir aux comportements d’autrui. A priori, il n’avait pas de prédisposition pour le faire avec une autre espèce, surtout aussi éloignée que l’homme, mais le travail a été fait à deux : l’homme est aussi une espèce sociale, c’est même la seule espèce sur Terre à avoir établi des relations avec autant d’autres animaux (et l’une des seules capables de spontanément donner sa nourriture). Cela n’exclue pas toutes les horreurs qu’a pu produire la société humaine, mais pragmatiquement, il est clair que l’humain a beaucoup joué dans sa nature coopérative à créer cette relation homme-chien.

Aujourd’hui, on observe des cas d’adaptation formidable entre l’homme et le chien, comme la posture d’appel au jeu, que l’humain comprend instantanément (même un enfant), ou la tête légèrement penchée, expression visuelle si humaine qu’elle déclenche systématiquement notre attendrissement. Le chien apprend très vite à s’en servir pour obtenir attention ou récompenses. Il observe nos réactions et, dans la mesure où il ne parle pas, il s’intéresse d’avantage à notre langage corporel, ce qu’on appelle la communication non verbale. Il lit alors nos émotions presque mieux que nous même, ce qui en fait un compagnon empathique.

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Le chien, un animal doué d'empathie

Cette qualité est une condition pour maintenir un groupe soudé, quelle que soit l’espèce : un groupe où les individus ne font pas attention les uns aux autres ne reste pas soudé bien longtemps. Mais non content de voir les émotions d’autrui, le chien s’apaise en faisant plaisir. Il agit un peu comme une éponge émotionnelle, se laissant emporter par l’humeur du groupe, et il réclame même des contacts réguliers pour se sentir bien. C’est pourquoi il faut vraiment limiter le temps que le chien passe seul : ce ne sont pas des conditions dans lesquels le chien s’épanouie.

Au final, le chien s’accommode très bien de la place faite pour lui dans nos familles. Sa socialité naturelle, mêlée à 10.000 ans de domestication, font de nos deux espèces un cas unique de coopération fusionnelle sur Terre.

Dr Stéphane Tardif
Docteur vétérinaire et rédacteur pour Wamiz

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