L'évaluation comportementale du chien, c'est quoi ?
Le premier texte, la loi du 6 janvier 1999 sur les animaux dangereux ET la protection animale, statue sur les animaux dangereux, errants, et la détention et la vente d’animaux de compagnie. Le volet « animaux dangereux » est devenu plus complexe après deux autres textes en 2007 et 2008, qui insistent sur la protection animale.
La loi n°2007-297 du 5 mars 2007 est relative à la prévention de la délinquance pour tout chien que le maire désigne comme potentiellement dangereux.
La loi n°2008-582 du 20 juin 2008 a généralisé l’évaluation comportementale pour tout chien mordeur, considéré comme dangereux par le maire, et de 1ère et 2ème catégorie, qui sont donc des chiens à évaluer.
L’objectif de l’évaluation est d’apprécier le danger potentiel que représente l’animal. Le chien est classé à l’issue de l’évaluation comportementale dans l’un des quatre niveaux de risque comportemental. Ensuite, le vétérinaire propose des mesures en réponse à l’évaluation. L'idée de base des textes est de limiter l'utilisation du chien comme une arme.
A quels chiens l'évaluation comportementale s'adresse ? Dans quels cas ?
Ces lois augmentent le pouvoir des maires dans les décisions (quel chien est dangereux ou pas…), elles renforcent les sanctions contre les propriétaires (différentes sanctions suivant la non observance de tout ou partie des règles). Elles sont dissuasives pour les propriétaires de chiens de 1ère et 2ème catégories. Elles positionnent le vétérinaire au centre du dispositif d’évaluation comportementale et d’identification : le maire est obligé de se référer à son rapport (sauf pour l'euthanasie, que le maire peut imposer, seules les associations de droit animal peuvent alors intervenir pour protéger le chien).
Elles s'adressent dont à tous les propriétaires de chiens catégorisés (comme définit par les textes), ainsi qu'à tout chien jugé et désigné potentiellement dangereux par le maire (notamment suite à une morsure) :
- Article L211-11 : tout chien désigné par le maire qui présente un danger de par les modalités de sa garde
- Article L211-13-1 : tous les chiens de catégorie entre 8 et 12 mois (c'est obligatoire pour les propriétaires pour avoir le permis de détention délivré par le maire).
- Article L211-14-2 : tout chien mordeur de personne.
Et naturellement, à la demande du propriétaire, on peut réaliser une évaluation, quel que soit le motif. Une circulaire du 17 février 2010 reprend l’interprétation des lois, comme un Vade Mecum, elle peut servir de référence.
Comment se déroule l'évaluation comportementale ?
Le chien est évalué au cours d'un questionnaire et d'un dialogue entre le vétérinaire évaluateur, et le propriétaire, ainsi que l'observation directe de l'animal pendant la séance. Le vétérinaire pratique une analyse de risque, et juge donc selon deux critères essentiels : la puissance du chien (et donc les dégâts en cas de morsure, critère basé sur le physique du chien) est croisée à la probabilité de morsure, critère basée plus sur son comportement : la multiplication de ces deux indices donne une mesure du danger, sur une échelle de 1 à 4.
Donc l'évaluation est obligatoire pour certaines races, et c'est à la charge du propriétaire de réaliser les visites. Par contre, une évaluation peut être demandée pour n'importe quel chien (suite à une morsure par exemple), la procédure à suivre varie ensuite selon les cas et sera donné par le vétérinaire évaluateur à l'issue de la première visite.
Le vétérinaire évaluateur est inscrit sur une liste départementale, sur la base du volontariat et choisi par le propriétaire ou le détenteur du chien.
Le système de notation et ses conséquences
Le résultat de l’évaluation et les recommandations du vétérinaire sont consignés dans un compte-rendu au propriétaire, et ça peut être transmis au maire/préfet (surtout s’il est à l’origine de la demande ou c’est obligatoire, sinon c’est le propriétaire qui s’en charge). Le compte-rendu donne les conseils et recommandation du vétérinaire, et classe le chien dans l'un des 4 niveaux de dangerosité.
Les différents niveaux dans lequel le chien peut être classé sont :
Niveau 1 : c’est un chien
Niveau 2 : le chien présente un niveau de dangerosité faible pour certaines personnes ou dans certaines situations. (en catégorie : réévaluation sous 1 an).
Niveau 3 : le chien présente un niveau de dangerosité critique pour certaines personnes ou dans certaines situations. (en catégorie : réévaluation sous 2 an)
Niveau 4 : le chien présente un niveau de dangerosité élevé pour certaines personnes ou dans certaines situations. (en catégorie : réévaluation sous 1 an). La catégorie 4 est rare, et justifie souvent d’un confinement ou d’une euthanasie.
Le maire ou à défaut le préfet, peut prescrire à son propriétaire ou à son détenteur de prendre des mesures de nature à prévenir le danger. Il peut à ce titre, à la suite de l’évaluation comportementale d’un chien, imposer à son propriétaire ou à son détenteur de suivre la formation et d’obtenir l’attestation d’aptitude prévue au I de l’article L211-13-1.
Il faut aussi penser à assurer le chien (responsabilité civile particulière pour les chiens de catégorie).
L'évaluation comportementale : combien ça coûte ?
Le prix d'une évaluation est standardisée, cela correspond au prix d'une consultation rapporté au temps que prend l'évaluation. Il peut y avoir plusieurs évaluations, mais elles sont généralement espacées dans le temps et les frais engagés ne sont du coup pas trop importants. Cependant, un grand nombre d'évaluation comportementale font suite à une morsure, et les évaluations sont souvent confondues avec la surveillance mordeur, qui correspond à 3 visites rapprochées. Il y a donc plus de frais à prévoir si la procédure d'évaluation est déclenchée suite à une morsure.
L'avis du véto
Il est difficile de se positionner sur cette loi car c'est une question politique. Globalement, les vétérinaires jugent ce texte peu efficace, et astreingant. Personnellement, je trouve qu'il ne remplit pas sa fonction, donnant des contraintes à une cible qui n'est pas celle visée par la loi (les chiens dangereux). Le fait que le texte ait été écrit rapidement, pour répondre à une pression médiatique, et sans la validation par des instances scientifiques sur le contenu, sont pour moi des arguments pour mettre à jour la loi.
Par exemple, le fait que la loi ne cible que certaines races a été vivement critiqué lors de la parution du texte. Les mises à jour effectuées par la suite, qui ouvrent notamment la possibilité de réaliser des évaluations à tout chien jugé dangereux, ont été données en réponse à ces critiques. Mais même malgré cela, on constate toujours des adoptions irresponsables et des situations dangereuses : mon approche serait plutôt celle d'un certificat de capacité, accompagné d'une formation, pour toute nouvelle adoption, afin de privilégier l'éducation des propriétaireS, la pédagogie, et la prévention plutôt que le contrôle et la répression.
Dr Stéphane Tardif
Docteur vétérinaire et rédacteur pour Wamiz
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