La perte d’un animal laisse bien souvent un grand vide dans le cœur de ses maîtres et les mots ne suffisent pas toujours à atténuer leur peine. Mais passé le choc émotionnel du décès de l’animal, il est nécessaire de réfléchir aux obsèques. Bien qu’elle soit très fréquente et largement plébiscitée par les vétérinaires, l’incinération collective ou individuelle n’est pas la seule option. D’autres alternatives existent et gagneraient à être étudiées d’un peu plus près.
Certains l’ignorent encore mais il est aujourd’hui possible de se recueillir sur la tombe de son animal pour honorer sa mémoire. En France, il existe une trentaine de cimetières animaliers répartis sur tout le territoire. Le plus ancien et le plus réputé se situe à Asnières et a été fondé en 1899 par l’auteur Georges Harmois et la journaliste féministe Marguerite Durand.
Qu'est-ce qu'un cimetière animalier ?
Le principe est exactement le même qu’un cimetière traditionnel. Avant toute chose, l’achat d’une concession funéraire (un emplacement dont vous achetez l’usage) est indispensable. Comptez entre 50 et 100 euros par an selon les nécropoles. Vient ensuite le choix d’enterrer son animal dans une fosse en pleine terre ou dans un caveau. Pour la première prestation, il faut compter entre 400 et 600 euros et jusqu’à 1.600 euros pour la seconde selon les tarifs communiqués par le cimetière animalier de Bessenay. Une fois l’inhumation terminée, les propriétaires ont également la possibilité de mettre en place un entretien régulier de la tombe (fleurissement ou nettoyage), un service jugé utile pour celles et ceux dont l’habitat est éloigné du cimetière. Le prix varie en fonction du type d’action et de la taille de la sépulture.
Tandis que certains s’orienteront vers une personnalisation classique de leur objet funéraire, calquée sur les sépultures humaines, d’autres en revanche miseront plus sur l’originalité comme l’a expliqué à Wamiz Carole Laly-Michel, l’une des créatrices d’Animastèle, une entreprise qui propose des pierres tombales entièrement personnalisables. Elle offre notamment à ses clients la possibilité de choisir la taille, la forme, l’origine de la pierre, la couleur et la police de la gravure. L’insertion de photos porcelaines ou de motifs fait également partie des possibilités. « L’origine de la pierre était un choix important pour nous. Pas question de faire venir des pierres de l’autre côté de la planète. Nous sommes installés dans l’Aveyron et nous avons choisi de travailler avec les carrières les plus proches de chez nous », a-t-elle expliqué précisant qu’elles étaient toutes gravées par leurs soins, entièrement à la main. Pour le délai de livraison, il faut prévoir entre deux semaines et deux mois en fonction des demandes.
Pour elle, cette démarche est essentielle dans le processus de deuil. « Une pierre nous permet de canaliser notre souvenir, de créer un repère qui aidera notre esprit à cicatriser. C’est sans doute pour cela que les pratiques funéraires ont si peu évolué depuis des millénaires ». Même son de cloche pour Delphine Simon, directrice du Sanctuaire des 4 pattes, une entreprise de fabrication d’objets funéraires pour animaux : « L’animal fait partie de la famille. Certaines personnes ont plus de satisfaction à vivre avec un chien ou un chat qu’avec un humain car il n’y a pas de vice, de question, de complication ». Interrogée au sujet de l’inhumation animale, elle estime qu’elle est de plus en plus courante mais « difficile ». « Même si le sujet se démocratise, il reste tabou. Les personnes ont peur d'être jugées par l'entourage », a-t-elle expliqué tout en présentant sa gamme de produits composée d’urnes, de plaques commémoratives et de mobilier funéraire. « Le produit le plus demandé reste le cercueil. Je ne suis pas sur une fabrication industrielle, mais sur du fait-main. Je travaille le bois de chêne et de hêtre et j'utilise des peintures bio. Pour le capitonnage, j'utilise du satin et divers tissus. Cet écrin doit laisser une belle vision de l'animal à la famille ».
En plus de fabriquer des objets funéraires, Delphine Simon propose un accompagnement au deuil en organisant des conférences et des séances destinées à soutenir et réconforter les personnes endeuillées. Elles se déroulent le plus souvent en visio par le biais de regroupements organisés ou en sessions individuelles. Une aide significative qui permettrait de se relever plus rapidement, continuer à vivre et ne plus appréhender les visites au cimetière.
Le rôle des communes
Privés ou mis à disposition par les communes, ces terrains sont gérés dans la majorité des cas par des associations de protection animale, des particuliers ou des sociétés privées. Mais suite à de très nombreuses sollicitations, certaines villes ont décidé d’en faire un service public. « Nous allons créer un cimetière animalier. Quelle que soit la sensibilité des gens, animalistes ou pas, personne n’est contre. Nous espérons qu’il sera prêt au deuxième semestre 2022. C’est vraiment génial » a expliqué Sandra Krief, membre du Parti animaliste et conseillère municipale de Grenoble déléguée à la Condition animale.
Mais pas question d’y afficher de différences sociales : « Nous ne voulons pas de stèles imposantes, pas de démonstration de richesse, simplement des petits signes de reconnaissance ». « Ce sera une grande prairie » où les personnes pourront discuter, se reposer sur des bancs. « Il faut que ce lieu d’accueil s’intègre à la nature ». Pour envelopper l'animal, la simplicité devrait aussi être de mise : ni boîte, ni carton, ni bois. « Les animaux seront directement enterrés dans un linceul, c’est une forme de respect pour l’animal. Si règlementairement nous pouvons le faire, nous le ferons de cette façon ».
Bien qu’encore trop peu nombreux sur le territoire français, ces cimetières semblent avoir un bel avenir. Pour elle, cette initiative devrait voir le jour dans d’autres communes. « C’est comme une traînée de poudre, ça prendra assez rapidement. Je suis certaine que ces cimetières contribueront à faire évoluer la condition animale. Il faut réellement mettre en avant le côté positif. Les politiques ont souvent peur de se prononcer sur la question animale car ils savent qu’ils peuvent être catalogué d’extrémiste à tout moment ». Une peur qui devrait s’estomper naturellement avec le temps compte tenu du poids croissant de la préoccupation animale dans le débat public.
Le boom des cimetières virtuels
Outre l’inhumation et la crémation de l’animal, il existe aussi un autre moyen de rendre hommage à son animal et de prolonger sa mémoire bien après le décès. Cela fait maintenant plusieurs années que les cimetières virtuels font des émules à l’instar d’Animorial, un espace sur lequel les familles endeuillées viennent poster et partager des photos ou des témoignages afin de se souvenir des bons moments passés avec leur animal.
« C’est presque comme un réseau social », a expliqué David Buisset, le directeur général d’Esthima France tout en rappelant que cette démarche continuait de diviser l’opinion. « Certaines personnes n’ont pas besoin de souvenirs et trouvent que cela va trop loin. D’autres en sont très amateurs. Cela dépend véritablement de chaque propriétaire, de son vécu et de la relation qu’il entretenait avec son animal. Il n’y a pas de jugement chez nous ».
Amandine Zirah