Ann, le coup du "tu vas pour un chien et tu reviens avec un autre", c'est tellement ça...
Décidée à prendre un chien après constitution d'une cagnotte sur trois ans, je me suis tournée vers les refuges et les assos.
Mon premier "choix" un petit berger des Pyrénées, âgé mais sympa comme tout, à qui j'ai rendu visite chez sa FA avant la semaine de réflexion imposée s'est éteint ce week-end là chez eux, paisiblement, dans son sommeil.
Qu'à cela ne tienne, direction un énorme refuge pour voir les chiens de taille moyenne, soyons raisonnables, j'ai un budget d'étudiante salariée.
Gestion façon usine, qu'on peut difficilement leur reprocher vu le nombre d'animaux, après passage par la case accueil on me donne un coin de feuille A4, un crayon de papier, et on me dit de faire le tour, noter le numéro de boxe du chien que je veux avant de repasser par la case départ pour faire les papiers.
Je déambule, dans un état second, entre les rangées de cages et les aboiements qui en sortent.
Les chiens petits et moyens, c'est tout au fond.
Un husky qui hurle, un rott qui s'égosille autant qu'il peut, un BA complètement toqué contre le mur du fond de son boxe en aboyant, un grand machin marron et squelettique qui me fixe en silence avec ses énormes yeux jaunes mouillés en remuant faiblement la queue... Salut toi.
Je m'approche, je peux le gratouiller? Oh que oui, il s'appuie de tout son poids contre le grillage, comme si en poussant assez fort il pourrait passer à travers pour finir dans mes bras.
Au refuge il s'appelle Yab, il a trois ans, il est là depuis six mois, c'est un dobermann (rigolo, j'en avais jamais vu des marrons).
Bon, on se ressaisit, je ne suis PAS venue prendre un grand chien. Allons voir les petits.
Même scénario, les cris, les pleurs, les hurlements, le chien que je suis venue voir est marqué "réservé". Demi-tour, on rentre à la maison.
Mine de rien, je repasse devant la cage du machin marron. Recoucou toi.
Il se jette sur le dos. Je sors mon papier et mon crayon. C'est quoi ton numéro de boxe? T'es gros mais t'inquiète, j'ai une cagnotte et je ferais des heures sup'.
A l'accueil on me dit qu'il est réservé, mais que la dame n'était pas sûre, et n'a pas rappelé. Et puis il n'est pas toujours super sympa ce chien. On prend mon numéro, je rentre chez moi.
Quelques jours plus tard, le téléphone sonne, les larmes aux coins des yeux je fonce vers le refuge, libérer une tornade marron de 18 kg.
"Il est compliqué, vous savez..."
M'en fous, moi aussi, on fera avec.
Neuf ans plus tard, avec 12 kg de plus et quelques dents en moins, il est toujours là, à me faire tourner en bourrique comme au premier jour. Il m'a suivie partout. Je lui fais des blagues, et lui me fait les 400 coups.
On s'engueule. On se boude. On se réconcilie.
Il me fait honte. Il me rend fière.
Qu'est-ce que je l'aime...